Un mois après les actions menées le 18/4, le projet Clarebout de construire une méga-usine à frites à Frameries vacille, mais il n’est pas encore mort…
Résumé des épisodes précédents …
Le 18 avril 2021, les organisations membres du Réseau de soutien à l’agriculture paysanne (RESAP) et d’Agroecology in Action (AiA) ont mené des actions à Frameries et en ligne en soutien du collectif de citoyens la Nature Sans Friture (NSF) contre le projet d’implantation d’une méga-usine à frites de l’entreprise Clarebout Potatoes et contre un modèle destructeur de développement agro-industriel.
Nous avons interpellé des femmes et hommes politiques sur ces 2 aspects.
Les jours précédant le 18 avril, des interpellations en ligne ont été adressées par de nombreux internautes sur Twitter, par mail et via Facebook.
Le lendemain de l’action, une lettre précisant nos constats et demandes a été adressée par AiA et le Resap aux huit ministres du gouvernement wallon [1] Une copie de la lettre a également été envoyée à l’ensemble des députés de la Commission de l’économie, de l’aménagement du territoire et de l’agriculture du Parlement wallon, ainsi qu’au ministre fédéral de l’agriculture, David Clarinval.
Succès médiatique et réactions politiques
Malgré les restrictions imposées aux manifestations par les « règles Covid », cette mobilisation a été un succès et a eu un grand écho médiatique local, national et même international !
Presque tous les ministres que nous avons interpelé-e-s nous ont répondu :
- Le Ministre-Président wallon, Elio Di Rupo (PS), a rédigé un courrier de réponse à nos interpellations. Sans se prononcer sur la révision du plan de secteur en tant que telle, qu’il renvoie à la responsabilité du ministre Borsus, il se dit toutefois attentif à veiller à la cohérence des politiques wallonnes. Dans ce sens, il estime que “l’installation d’une usine qui vise essentiellement la grande exportation ne semble pas cohérente par rapport au modèle agricole que la Wallonie défend dans les accords internationaux”.
- Céline Tellier (ECOLO), Ministre de l’Environnement, a publié une vidéo et un communiqué. Elle se prononce en soutien de nos revendications et dénonce le “modèle patate belge” : “Doit-on continuer à être fiers d’être les premiers agro-exportateurs de pommes de terre transformées et que les citoyens américains mangent nos pommes de terre dans leurs fast-foods ? Je ne le pense pas.”
- Christie Morreale (PS), Ministre de l’action sociale, a également répondu favorablement en disant qu’il appartient au gouvernement “de défendre un modèle paysan qui limite ses externalités négatives sur l’environnement, qui favoriser l’émergence de l’agroécologie mais aussi qui permet aux agriculteurs et à leurs familles de vivre dignement (…).”
- Les ministres Clarinval et Crucke nous ont eux aussi renvoyés à la décision de Willy Borsus, et les ministres De Bue et Henry ne nous ont pas répondu.
- Malheureusement, Monsieur Borsus, n’a pas répondu à notre lettre. Il a cependant envoyé une réponse à des messages individuels où, tout en affirmant son devoir de réserve, il se dit à l’écoute « de tous les points de vue », entend les inquiétudes « surtout sur le plan environnemental ». Un positionnement qui pourrait faire craindre une décision en faveur de Clarebout argumenté par exemple pas les aspects économiques…
Le sort de l’usine à frite se joue à la Région wallonne
Le positionnement de Willy Borsus est effectivement essentiel dans le dossier…
Une révision du Plan de secteur de la zone Donaire (d’”industrielle” à « activité économique mixte ») a été demandée par la Commune de Frameries à la Région wallonne. Cette révision pourrait empêcher l’implantation de Clarebout et d’autres industries lourdes, au bénéfice de PME et services.
La réponse doit être donnée in fine par Willy Borsus, sur délégation du gouvernement wallon.
L’enquête publique de la Commune de Frameries est clôturée depuis le 8 mai 2021, de nombreux citoyens ont exprimé leur soutien à cette demande de modification, ainsi que les communes voisines de Quévy et de Mons.
Le 11 mai 2021, le collectif citoyen NSF, brillamment représenté par Florence Defourny, a été entendu par la Commission de l’économie, de l’aménagement du territoire et de l’agriculture du Parlement wallon (vidéo à partir de 5h16’) pour une présentation très percutante de leur pétition soutenant ce changement d’affectation.
Les membres de cette Commission, tous partis confondus, se sont déclarés convaincus qu’une industrie d’une telle ampleur n’a pas sa place à Frameries, étant donné la proximité du site par rapport aux habitations.
Willy Borsus a lui aussi assisté à cette présentation, a souligné sa qualité et a exprimé le souhait de se rendre sur les lieux pour “mieux se rendre compte”.
La vigilance s’impose jusqu’au finish !
Les lignes commencent donc enfin à bouger dans le bon sens ! Cependant rien n’est encore joué…
- La direction d’IDEA [2] , l’intercommunale qui possède une partie des terrains, reste toujours favorable au projet Clarebout et au caractère industriel de la zone.
- Lors du vote du Conseil d’administration de l’IDEA du 29 avril 2021 visant à SOUTENIR le maintien de l’affectation industrielle de la zone, les politiques présents se sont abstenus, mais aucun n’a voté contre, malgré leurs déclarations publiques d’opposition au projet Clarebout.
- Au final, ce sera la décision de Willy Borsus et de lui seul… Et le risque qu’il joue la carte de “Clarebout est bon pour l’emploi et l’économie” n’est pas écarté, bien que, selon les chiffres de l’IDEA même, le passage en zone d’activité économique mixte serait susceptible de créer plus d’emploi qu’une zone industrielle (et de meilleur qualité !).
Les luttes en cours pour Frameries ne nous font pas oublier que le combat est global !
Plus globalement, le MR a communiqué dans la presse qu’il comprend et soutient la demande des riverains de Frameries, mais reste par contre favorable au projet de Clarebout sur un autre site. Dans ce sens, le MR demande à l’IDEA d’identifier un autre site adéquat pour accueillir l’entreprise.
C’est évidemmentcontraire aux revendications de la campagne du 17 avrilqui demandait bien d’enterrer une bonne fois pour toute le projet de Clarebout à Frameries et partout ailleurs !
Pour rappel, l’article premier du Code wallon de l’Agriculture précise que la Région développera des politiques soutenant le modèle de « l’agriculture familiale, à taille humaine et écologiquement intensive » et donnant la priorité à « la fonction nourricière locale de l’agriculture wallonne ».
C’est le moment de le démontrer dans les actes, en stoppant le développement tentaculaire et les projets destructeurs de l’agro industrie, et en particulier de l’agrobusiness belge de la frite polluante et axée sur les exportations, à Frameries et ailleurs.